Blanc, Jean-Noël

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Né en 1945. Travaille à Lyon où il est sociologue spécialisé dans l’architecture et l’urbanisme et vit à Saint-Etienne. Entre ces deux villes, ses trois enfants et ses quatre chats, il écrit, essentiellement des nouvelles, parce qu’il apprécie le plaisir technique de  » faire court « . Comme ces textes brefs ont souvent, de l’un et l’autre, des thèmes qui se recoupent et des personnages qui se retrouvent, il baptise  » roman-par-nouvelles  » les recueils qui les rassemblent. « auteur (de romans, de nouvelles, et de  » romans-par-nouvelles « ) par besoin et par bonheur cycliste (du dimanche) par pur plaisir.

Sociologue (de l’architecture et de la ville) par hasard et par intérêt

 » du même auteur  » :

* La légende des cycles, Quorum, 1996

*Jeu sans ballon, Seuil, 1996

*Hôtel intérieur nuit, HB éditions, 1995

(Prix Renaissance de la nouvelle – Belgique)

*Galipettes arithmétiques choisies, Le Dilettante, 1993

*Langue de chat, La Farandole, 1993. [Réed. Pocket 1995]

*Fil de fer la vie,. Page blanche, Gallimard, 1992

(Totem Télérama/Salon de Montreuil du roman de jeunesse)

*Polarville, Presses Universitaires de Lyon, 1991

* Esperluette et compagnie, Seghers, 1991

(Prix de la nouvelle du Mans) (Prix Charles Exbrayat)

*Penalty, Dumerchez, 1990

Chiens de gouttière, Seghers, 1989. Epuisé.

Bardane par exemple, Ramsay, 1986. Epuisé.

Alors comme alors, Ramsay, 1985. Epuisé.

(Prix littéraire de la ville de Lyon)

L’Un ou les ciels peints, Fédérop, 1977.

*= à la médiathèque

_______________________________ Hôtel intérieur nuit

Dessins originaux de Pierre-Noël Bernard
HB, 1995

Prix Renaissance de la nouvelle, 1996

Des destinées diverses et des sorts opposés se croisent, s’évitent, s’ignorent, se rencontrent, se frôlent ou se fuient dans un même hôtel, au cours dune seule nuit.

 » On croise plein de gens de divers milieux aux prises avec les soucis de la vie. […] Jean-Noël Blanc les peint avec tendresse. […] cette tendresse, peut-être, qui prend de plus en plus de poids dans l’écriture quand un écrivain arrive à la cinquantaine « .
La Liberté de lEst

Ville extérieur nuit

C’est une rue mince et de renommée courte. Elle ne fait pas de manières. Elle ne fait pas de tintamarre non plus. Elle s’ouvre en catimini sur l’avenue de la gare, et conduit à une petite place carrée qu’on ne découvre qu’au dernier moment, comme par surprise.

Entre l’avenue et la place, elle abrite l’hôtel.

Le bâtiment ne paie pas de mine. C’est un de ces établissements qui conviennent à des voyageurs sans gloire et sans attache. Il est coincé entre deux immeubles qui l’écrasent un peu, sa façade a les épaules étroites et le buste long, elle se décolore au fil des saisons, et personne n’y prête attention. Les murs sont à présent couleur de temps qui passe, et le temps n’en finit pas de passer.

Le soir, longtemps après que les grandes brasseries de l’avenue ont éteint leurs néons, seul l’hôtel demeure éclairé. Entre les façades obscures de la petite rue, il retient dans la nuit une poignée de lumière jaune. Elle s’échappe par la porte ouverte, coule sur le trottoir, y dessine une manière de tapis.

Cette amabilité plaît aux amoureux. Ils tournent le dos à la gare et à l’avenue pour s’enfoncer dans la petite rue. La clarté de l’hôtel les attire. C’est une lumière à hauteur d’homme. Elle habille le trottoir, et, tandis qu’ils la frôlent sans oser la piétiner, elle agite leurs songeries.

C’est qu’ils ont des gourmandises de secrets. Ils cherchent des abandons dans des replis de ténèbres, et des mystères dans des lueurs de lanterne.

Parfois leur marche s’interrompt. Un porche abrite leurs tendresses fugitives. Sur les pierres de la porte cochère, un réverbère diffuse des douceurs. La ville a pour eux des bontés d’encoignures.

Puis, enlacés, ils reprennent leur flânerie jusqu’à la petite place du bout de la rue. Ils contemplent les lampadaires bas, les marronniers lourds, la clarté rabattue vers le sol sous les feuillages d’un vert fixe et précis comme une peinture .

Il fait une nuit à ne pas dormir. La chaleur du jour s’est attardée, elle a pris ses aises, elle s’étale. Une tiédeur vagabonde. Des parfums battent le pavé. Des chimères obscures courent les rues. Il vient aux citadins des appétits de ville…

Et bien dautres histoires

(chambre 09)

Ahmed dit que, dans ce métier, des choses, il en voit, et des gratinées. Il s’est penché en avant et a posé les coudes sur le comptoir de la réception. Toute la nuit à veiller dans un hôtel qui dort, et toutes ces heures à attendre le client, il dit qu’il pourrait en raconter sur ce qu’il a vu. Des vertes et des pas mûres. Il jette un coup d’oeil à gauche, à droite, pour repérer si personne ne vient. Sa tête ne suit pas le mouvement. Il ne bouge que les yeux. Son cou avance très légèrement. Il guette. Il dit, ce que font les gens, ce qu’ils inventent, c’est à n’y pas croire. Si quelqu’un racontait, sûr et certain que ça ferait un roman. Seulement, hein, pas question de raconter. Il dit, ce métier, monsieur, c’est les trois singes : rien vu, rien entendu, rien dit.

Il sourit. Il cligne de l’oeil. Sur son sweat shirt, on voit écrit, en grosses lettres, Welcome. Dans le hall d’accueil de l’hôtel, c’est le silence.

Dans le hall d’accueil désert, Ahmed fait de petits rangements. Il n’y a pas grand-chose à ranger sur le comptoir. Un cendrier de céramique, une lampe montée sur un magnum de champagne, un petit paquet de cartes publicitaires pour l’hôtel, une sonnette mécanique, un présentoir de dépliants touristiques, un journal, quelques revues.

En manipulant ces objets, il dit qu’on voit de tout dans un hôtel. Même dans un établissement aussi modeste que celui-ci. Il dit que le plus incroyable ce n’est pas cette manie qu’ont les clients de voler tout ce qui peut se voler, les savonnettes les serviettes de bain les oreillers les lampes les draps. Ni de salir les lieux comme on ne peut pas se le figurer tant qu’on ne l’a pas vu. Ni de faire du boucan en plein milieu de la nuit ni de trouver le moyen de protester pour un rien et de réclamer tout et n’importe quoi. Ni même d’attendre d’être à l’hôtel pour avoir les ennuis les problèmes les accidents les surprises, comme cette fille qui l’autre année avait accouché dans une chambre là-haut.

Et bien d’autres histoires, dit Ahmed. Qu’il pourrait raconter s’il voulait. Et qui ne sont pas ce qu’il y a de plus extraordinaire. Le plus étonnant, dit Ahmed, c’est les gens.

Il déplace les objets sur le comptoir. Ce sont des déplacements de quelques centimètres. Tout a bougé et rien n’a changé. Ahmed prend du recul pour considérer son ouvrage.

Il dit que pas plus tard que tout à l’heure il vient d’entendre un type jouer du violon dans une des chambres. Il dit, vous voyez, les gens. Il hausse les épaules. Il dit qu’une chaleur pareille, en pleine nuit, ça étouffe.

Fil de fer, la vie
Roman-par-nouvelles
Gallimard (Page Blanche)
1993

Totem Télérama/Salon de Montreuil

– Sept fois deux nouvelles, qui vont par paire. Si le fil conducteur semble anodin – la vie d’Henri, un enfant comme les autres-, les autres récits ne le sont pas. Ils évoquent des situations extrêmes, celles d’enfants en détresse, confrontés à l’abandon, à la violence, à l’inacceptable –

 » J’aime bien écrire en adoptant le point de vue d’un enfant sur le monde qui l’entoure. Ça permet de travailler un ton doux-amer, du genre sourire au milieu des larmes. Parce que l’enfance, ‘cest comme ça : un grand gâteau de chagrin au sucre. Ça a ce goût-là. »
Jean-Noël Blanc

 » Jean-Noël Blanc est un gourmand de mots. Il en joue sur le mode de la tendresse et de l’humour, avec une pointe de dérision pour que ça fasse moins mal. « 

Yvette Granger, Le Progrès.

 » Un roman qui serre de si près la vie des autres que le moindre mot peut faire mal. « 

L’humanité dimanche.

Galipettes arithmétiques choisies
textes brefs, Le Dilettante
1993

Les chiffres ne se chiffrent pas, tant ils sont illimités, innombrables. Mais certains nombres comptent pour nous, alors on les retient demblée : 1515, 33, 007. Pour tous ceux-là, l’auteur a concocté de petites saynètes

 » Il sait mieux que quiconque aujourdhui, conjuguer l’enfance et les mots, la tendresse et l’humour « 

Yvette Granger, La Tribune Le Progrès


En dépit du corset qu’elle porte trop ajusté, elle s’épanouit, la bouchère (ou charcutière, peut être). Pardi, l’étranglement de sa taille, en faisant déborder sa poitrine et rebondir ses hanches, donne à ses formes une générosité qui réjouit l’oeil.

Trop grand. Il ne tient pas dans le cadre. De lui, on n’aperçoit que la moitié inférieure : d’interminables abattis.

On devine la posture, malgré tout. Debout, les fesses au mur, une jambe pliée, le pied au niveau du genou de l’autre jambe, laquelle s’éloigne du mur pour assurer l’équilibre, il roule une cigarette. Ou joue de l’harmonica. Ou sifflote. Ou, les mains aux poches, lorgne les filles. Ou attend que passe le temps.

On a toute liberté d’imaginer ce que trafique cette espèce de géant désoeuvré.

Tout de même, on se demande.

Un seul pied, et si peu accroché au sol.

Avec ça, le nez en l’air.

Pas les pieds sur terre, la tête dans les nuages : tout l’homme.

Esperluette et compagnie
roman-par-nouvelles, Seghers
1991

Prix Charles Exbrayat

Prix de la Nouvelle du Mans

 » Les petits bouts de vie, petits bouts de récits, morceaux d’existences que Jean-Noël Blanc recolle avec des mots perdus, oubliés, retrouvés « 

Alain Salles, Le Monde

 » Un texte superbe dhumour tendre et de tristesse contenue […] un livre de très haute qualité, alerte et poignant, à l’image d’un style qui s’affirme à chaque fois avec une netteté croissante « .

Jean-Claude Lebrun, Révolution

Penalty
Nouvelle illustrée, Dumerchez
1990

Publiée dans Esperluette et compagnie, Seghers, 1991

– Un enfant regarde son grand-père, dans une chambre dhôpital ; ils se disent l’essentiel, pleins de pudeur et d émotion… –

 » Une extraordinaire histoire d’amour, de complicité, entre un vieillard et son petit-fils « 

Le Progrès

Jeu sans ballon
Roman, Seuil
1996

Quatre-vingt-dix séquences, ainsi que quinze séquences médianes, correspondant aux quatre-vingt-dix minutes d’un match de foot, plus les arrêts de jeu : retransmission des tensions, des craintes, des enthousiasmes, des bonheurs, des détresses, des espoirs, de ceux qui sont assis sur le banc des remplaçants pendant une finale européenne de la Coupe des Coupes. Un jeu sans ballon.

 » Jean-Noël Blanc fait partie de ces écrivains discrets, dont les amateurs de littérature citent fréquemment le nom. Ses livres se présentent en effet toujours comme des petits bijoux de langue. Jeu sans ballon ne déroge pas à cette excellente habitude. « 

Jean-Claude Lebrun, L’humanité

 » Un tendre et lumineux livre que l’on doit à la vista du Stéphanois Jean-Noël Blanc […] Voilà un bel écrivain doté d’un style carioca, qui sait tricoter la phrase, contrôler du gauche, feinter du droit, ratisser large, surtout dans la malle à souvenirs, manier un style incisif et chaloupé, vif et frais. Un caviar « 

Patrice Delbourg, l’Evènement du Jeudi

La légende des cycles
Récits, Quorum éd. (Belgique)
1996

 » Le souffle de Vialatte passe sur cette prose qui nest pas uniquement réservée au bonheur dêtre à bicyclette « 

Daniel Martin, La Montagne dimanche

 » Un livre plaisant et drôle […]. C’est presque de la vélosophie. […] Ce cycliste-là est aussi un philosophe »

Ouest France

 » Après une lecture, une seule solution : monter en selle pour goûter aux plaisirs si bien décrits « 

Vers l’avenir, Namur

 » Cest une déclaration d’amour au vélo […] dont le lyrisme confine à la poésie et au miracle « 

La Tribune, Saint-Etienne

 » Un humour bienveillant […] des accès de verve et de lyrisme « 

Le peuple, Charleroi

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